TESTER VOTRE RISQUE DE DÉPENDANCE Reposant sur des items simples ( Vous arrive-t-il de prendre plus de médicaments que ceux qui vous sont prescrits ? ), le questionnaire POMI permet de se tester quant à une éventuelle utilisation inappropriée des antalgiques.
Pour sa part, l ORT aide les médecins à dépister le risque de mésusage avant la première prescription d opioïdes forts.
Pour en savoir plus ofma.fr
ANTI-DOULEURS PAS SANS DANGERS
Paracétamol, anti inflammatoires, codéine, tramadol utilisés contre la douleur, ces antalgiques ne sont pas anodins : par mésusage, surdosage ou encore risque de dépendance. Voici quelques repères pour s en préserver.
Les différentes classes d anti-douleurs Ils sont répartis dans trois catégories, selon leur mode d action et l intensité de la douleur à traiter. Ceux dits de premier niveau, destinés aux douleurs légères, tels le paracétamol, l acide acétylsalicylique (aspirine) et les anti inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Ceux de deuxième niveau, prescrits en cas de douleurs sévères ou résistantes aux analgésiques du premier pallier, comme le tramadol, la codéine et la poudre d opium (substances opioïdes faibles). Enfin, ceux de troisième niveau, les opioïdes forts (composés de la morphine et de ses dérivés), prescrits sur ordonnance sécurisée pour les douleurs arthrosiques, les lombalgies chroniques réfractaires et les douleurs neuropathiques périphériques ou centrales : la buprénorphine, le fentanyl et l oxycodone.
Des mécanismes d action distincts Si les analgésiques de premier niveau présentent des effets toxiques en cas de dépassement des doses maximales recommandées, ils n entraînent pas de dépendance car ils n agissent pas directement sur le système nerveux central. Il en va autrement des deuxième et troisième niveaux. Les opioïdes interviennent au niveau du cerveau en se fixant sur des récepteurs spécifiques sensibles à l endorphine, une substance secrétée naturellement par l organisme qui inhibe la douleur , explique Philippe Arvers, médecin addictologue à l université Grenoble Alpes. Ainsi, la codéine, dérivée du pavot, bloque les signaux de la douleur en se transformant partiellement en morphine, mais active également le circuit de la récompense.
Attention à l automédication et à l accoutumance L utilisation prolongée des antalgiques opioïdes peut engendrer un phénomène d accoutumance augmentation des doses pour obtenir les mêmes effets , voire de dépendance. Leur prescription doit tenir compte des antécédents du patient, notamment en cas d addiction à l alcool ou d état dépressif, rappelle Philippe Arvers. Dans tous les cas, il faut éviter l automédication. Initialement en vente libre, les opioïdes faibles sont délivrés sur ordonnance non renouvelable depuis juillet 2017. La prescription de codéine aux enfants de moins de 12 ans, contre la toux et la douleur, est interdite en France depuis avril 2015, en raison de risques d effets indésirables graves, voire mortels. Quant aux opioïdes forts (1), ils ont été responsables de plus de 400 000 décès aux États Unis entre 1999 et 2018, selon les centres de contrôle des maladies (CDC) américains.
Mieux prescrire pour un meilleur usage Afin d utiliser les antalgiques opioïdes à bon escient, le réseau de prévention des addictions (RESPADD), associé à l Observatoire français des médicaments antalgiques (OFMA) et au réseau français d addictovigilance, a publié un guide pratique (2). Y est rappelé la nécessité d établir un diagnostic et d évaluer régulièrement la douleur, de mettre en place un traitement co analgésique (avec du paracétamol, du néfopam...) et d expliquer le traitement au patient de façon détaillée. Le mésusage survient généralement lorsque l antalgie prescrite est insuffisante.
Outils éducatifs et surveillance médicale Le niveau de la douleur est subjectif mais on peut suivre ses variations dans le temps grâce à des échelles d auto-évaluation chez les adultes ou des échelles comme Dompoplus ou Algoplus pour les personnes incapables de communiquer Et vérifier ainsi que le traitement est efficace , note Philippe Arvers. Il cite aussi l éducation thérapeutique : elle permet aux patients de comprendre le mécanisme de la douleur chronique et les facteurs aggravants afin de diminuer son impact sur leur qualité de vie, et in fine de mieux gérer l emploi des antalgiques. Lutter contre la douleur n est réellement efficace que dans le cadre d un travail en réseau avec les médecins, les spécialistes, les officines, où les patients sont au centre.
KATIA VILARASAU (1) En France, leur prescription a augmenté d environ 150 % entre 2006
et 2017, selon l Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
(2) https://www.respadd.org/wp content/uploads/2018/10/Livret opioides 1.pdf
8 Valeurs mutualistes n°325 3e trimestre 2021
En 2017, 78 % des antalgiques consommés par les Français étaient non opioïdes. Source : Agence nationale de sécurité du médicaments et des produits de santé (ANSM).
RESPECTER LA POSOLOGIE
La plus faible dose d opiacés doit toujours être recherchée, en combinaison avec un
autre antalgique (paracétamol, néfopam ) afin d optimiser l efficacité du traitement. Il est important de respecter le dosage, la fréquence et le mode d administration
prescrits pour éviter tout risque de surdosage. Si les douleurs ne sont
pas soulagées, mieux vaut changer de traitement.
Près de 20 millions de Français souffrent
de douleurs chroniques rebelles aux traitements antalgiques
conventionnels. Source : Académie nationale de médecine, 2018.
PRÉVENTION